Évidemment, il y a “Retraite” et “Retraite”… Au cas où ça n’aurais pas été clair jusqu’à présent… Il est temps que je précise ce que j’entends par “Prendre ma retraite à 40 ans”.
Aucune confiance dans le système de retraite officiel
Il faut d’abord comprendre que je ne compte ABSOLUMENT PAS sur la Sécurité Sociale pour ma “Retraite”. J’ai fait une croix dessus depuis bien longtemps. Je pense que tout ceux de ma génération et des suivantes feraient bien de faire de même. Au mieux je serais agréablement surpris d’avoir droit à quelque chose quand j’aurais atteint 67, 70 ou qui sait 75 ans… Mais au moins, je serais pas surpris si je n’ai droit à rien. Option à mon avis la plus probable au cours où vont les choses. N’en déplaise à toutes les promesses qui nous sont faites.
Cette conviction est chez moi bien plus ancienne que tous mes projet d’indépendance financière ou de “Retraite anticipée”. Les cotisations que je paye aujourd’hui, je me console en disant qu’elles servent à payer les retraites de mes parents… Mais je n’attends pas à en retirer quoi que ce soit plus tard. Même si je continuais à travailler bien sagement pendant encore 20, 25 au même 30 ans…
Le pré-requis de la Croissance perpétuelle
Le système actuel est basé uniquement sur une perspective de croissance perpétuelle. Il faut bien comprendre ça. Les cotisations que la génération de mes parents ont payé (et qui font qu’aujourd’hui ils trouvent légitime de recevoir une pension dont le montant est non négociable) n’ont jamais été suffisantes pour leur garantir un revenu qu’ils considèrent comme suffisant pendant tout ce qui leur reste à vivre. Du moins pas dans un monde sans croissance du PIB.
Le système est donc biaisé : il ne fonctionne qu’avec au moins 2% de croissance par an et tous les calculs d’équilibre sont fait ainsi… Quand tu entends dans les médias que le gouvernement table sur un retour à l’équilibre à telle échéance lointaine, on te parlera de tout un tas de mesures nécessaires pour y arriver (réduction de ceci, augmentation de cela, etc). Éventuellement un journaliste un peu pointu ira parler de démographie et donc creuser les études qui traitent de population dans chaque classe d’âge, etc (et tant mieux, c’est très intéressant). Mais jamais personne n’évoquera une seule fois une hypothèse de base qui fait que le château de carte tient en apparence debout : les fameux 2% de croissance du PIB.
Ouais, mais tu chipotes là… 2% c’est pas grand chose… si c’était moins, ça changera pas la face du monde (et de ma retraite !)…
Où 2 + 2 + … + 2 + 2 ne font pas n x 2 mais nettement plus que n x 2 !
Ben… si… c’est là toute la puissance des fameux “intérêts composés”. Entre un PIB stable et un PIB croissant de 2% par an pendant 40 ans (durée approximative d’une carrière et encore), et bien ça fait non pas +80% mais +120%… Le PIB est donc multiplié par 2,2 en l’espace d’une carrière professionnelle. Et encore on ne parle “que” de 2%, ce qui représente quand même une croissance bien faiblarde… Pour preuve, voici la variation annuelle du PIB français ces 60 dernières années:

Je t’ai aussi mis la variation du PIB par habitant. C’est bien que le gâteau croisse. Mais pour que chacun ait une part plus grosse chaque année, il faut aussi que le nombre de convive croisse moins vite que la croissance du gâteau ! C’est important de le rappeler. Car on l’oublie souvent (chaque fois qu’on parle de PIB dans les médias, on parle le plus souvent de PIB total en valeur absolue… il est assez rare qu’on le ramène par tête de pipe… or ça a son importance !).
Alors, toujours aussi joueur ?
A la vue de cette courbe, si je te disais que tu dois parier sur le fait qu’elle reste cramponnée au moins à cette barre fatidique des 2% par an sinon ta future retraite “officielle” sera réduite ? Et rappelons-le… pas forcément “qu’un peu”… Si on enchaine des années sans croissance, sans même parler de crise économique voire de “décroissance”, ça peut être réduite de beaucoup… Genre plus que d’un facteur 2… Alors tu réponds quoi ? Que tu vas laisser les économistes et les dirigeants politiques faire leur travail et leur faire confiance ?
Quand les politiques s’en mèlent…
Personnellement, j’ai assez vite choisi… Je me rappelle d’une réunion publique un soir (quand c’était encore possible !). Ca devait être en 2014… la députée de ma circonscription, ou plus exactement la suppléante devenue députée en remplacement du député nommé au gouvernement, présentait un bilan intermédiaire de son mandat. Elle parle à l’époque des discussions en cours pour ramener le régime des retraites à l’équilibre et de sa confiance dans la capacité du gouvernement d’y parvenir. Autour de moi, la moyenne d’âge est plutôt élevée. Disons principalement des retraités. Elle-même, la soixantaine, nous assure que tout va bien se passer et que l’avenir est stabilisé pour les générations futures…
Regardant autour de moi, je me dis que l’avis d’un “jeune” serait peut être un peu différent et plutôt à l’opposé de l’optimisme béat… Je demande la parole et je lui indique que pourtant l’immense majorité des jeunes n’ont plus confiance dans ce système de retraite. Nous payons, les retraités actuels reçoivent, et je lui dis très clairement que personnellement, j’ai fait une croix sur le fait de recevoir un jour quoi que ce soit pour ma “retraite”…
Et là, chose à laquelle je ne m’attendais pas, elle m’explique que c’est pour ça que le gouvernement fait le nécessaire pour revenir à une croissance d’au moins 2% par an, et que c’est grâce à cela que le système va revenir à l’équilibre… Bon… j’en suis resté sur le cu… en gros elle me disait que comme on aura plus d’argent demain, tout ira bien… On peut continuer à dépenser plus que ce qu’on a dès aujourd’hui… (comme on le fait presque tous les ans depuis au moins 3 décennies)…
Une addiction structurelle à la croissance
Depuis, il faut le reconnaître, de l’eau a coulé sous les ponts:
- La partie “assurance vieillesse” a connu une amélioration continue depuis 2014 jusqu’en 2019 et est devenue excédentaire en 2016. De là à y voir un succès durable des “réformes” de cette époque…
- En 2020, le déficit de cette branche, comme de l’ensemble de la Sécurité Sociale, est abyssal. A l’heure actuelle les chiffres précis n’ont pas été communiqués. Mais on parle de plus de 50 milliard pour l’ensemble de la Sécu et du Fond de Solidarité Vieillesse. Et ça semble difficilement s’arranger pour 2021 et les années suivantes. La crise économique succédant à la crise sanitaire (ou plutôt se “superposant”…).
- La fameuse “croissance verte”, “dématérialisation de l’économie” et autre mirages de greenwashing n’ont pas eu lieu et n’auront pas lieu. J’expliquerais pourquoi j’en suis convaincu dans un autre articles (ou plutôt une série !).
A nouveau on voit qu’un régime dont les dépenses sont approximativement “gravées dans le marbre” (démographie connue et parfaitement prévisible à l’échelle du pays, politique de versement des retraites basée en gros sur “pas touche au montant des retraites”, et ce “quoi qu’il en coûte”, etc) et dont les recettes sont très fortement dépendantes de la situation économique, est très fortement impacté par une récession.
Un système de retraite lissant les aléas économiques ?
Le même scénario est survenu pendant la crise de 2008-2010. Un système lissant les aléas économiques pourrait exister. En imaginant qu’ils soit déficitaire les mauvaises années, cela pourrait être compensé par les bonnes années. Mais il faut pour cela :
- Qu’il y ait effectivement une alternance de bonnes de de mauvaises années. C’est à dire que les crises soient suivies de périodes d’égale importance de reprise économique.
- Que lors des périodes d’embellies le déficits des mauvais années soit rapidement comblé.
Or il n’en a jamais été ainsi. Au global, même que la période relativement favorable de 1990 à 2019 (où le PIB a globalement cru de 57% passant de 1497 à 2349 M€), le déficit cumulé est de 50 M€ sur 30 ans. C’est pas énorme tu me diras (moins de 0,1% du PIB). Mais le plus important est de voir que les périodes d’amélioration (1998-2004: amélioration de 5,7 M€, 2016-2019: amélioration de 4,7 M€) ne sont absolument pas “du même ordre de grandeur” que les périodes de détérioration (1990-1997: -14,9 M€ et surtout 2005-2015: -45,5 M€). Et 2020 n’est pas encore compté là-dedans… Encore moins les années qui vont venir !
Et pourquoi pas un système de retraite déficitaire après tout ?
A ce stade, on pourrait dire: “Ok, le régime de retraite est structurellement déficitaire. On l’accepte et c’est ainsi”. Mais alors il faudrait que les actuels retraité (et ceux qui le seront dans un futur proche admettent qu’il en est ainsi. Et donc arrête de penser et dire que leur droit à la retraite est du à leurs années de cotisation et qu’il est donc normal qu’ils en récoltent aujourd’hui (ou demain) les fruits.
C’est en grande partie vrai : les redistributions des retraites représentent aux environ de 13% (+/- 1% du PIB) et le déficit moyen n’est “que” de l’ordre de 0,1% du PIB. Mais ce n’est pas totalement vrai. Mais une fois cela admit, on peut ensuite envisager de dire que si le déficit se creusait trop, on pourrait moduler le montant des pensions versées… C’est une partie de ce que le gouvernement a tenté, maladroitement face à un sujet explosif, de faire inscrire dans la loi en 2019… Avec le résultat que l’on connait. Bref, on en revient à “touche pas à ma retraite”…
Où on s’approche de la pyramide de Ponzi…
Ma conclusion personnelle est que le schéma, sans aller jusqu’à parler d’une pyramide de Ponzi ou de Madoff, s’en rapproche fortement. Certains économistes spécialistes de la question des retraites n’hésitent pas à le dire. Personnellement, je n’irai pas jusque là une pyramide de Ponzi présuppose une volonté de nuire et de produire une escroquerie. Ce n’est évidemment pas le cas de notre système de retraite. Cependant, il ne faut jamais oublier qu’il n’est nulle part écrit dans notre système actuel que les cotisants actuels bénéficieront effectivement d’une pension future en contrepartie de leur cotisations actuelles…
J’en déduis donc, au vu de la situation dans laquelle nous sommes, que mon meilleur choix est de ne pas compter sur ce système pour mes vieux jours (et les moins vieux non plus !). Cela n’a rien à voir avec la crise conjoncturelle actuelle. Ca va durer quelques années. Cela va faire très mal à beaucoup de gens. Peut-être aussi que cela fera prendre conscience de certaines réalités. Mais ça va passer. Par contre, c’est bien du fait de l’impasse structurelle dans laquelle nos économies développées s’enfoncent. Cette impasse a un double-nom : crise écologique (dont le changement climatique n’est qu’une des facettes, quoi que à mon avis la plus grave), et la déplétion des ressources fossiles.
Qui sort gagnant d’un Ponzi ?
Dans une pyramide de Ponzi, une grande partie de ceux qui y sont entré en sortent lésés. Les plus concernés sont les derniers à y entrer. Dans le cas d’un système de retraite par répartition comme le nôtre, plus tu auras cotisé longtemps dans ce système, et plus tu y perdras si il s’écroule avant que tu ne puisses effectivement bénéficier d’une pension. Rares sont ceux qui n’y laissent pas de plumes. Mais on peut citer toutes celles et ceux qui auront bénéficié d’une retraite longtemps et “à taux plein” (comprendre “à un bon ratio de conversion par rapport à la moyenne de leurs cotisation”). La génération qui part actuellement à la retraite est plutôt bien placée pour ça :
- Ils partent assez jeunes à la retraite
- Leur espérance de vie est élevée (rien ne dit que cela va le rester, on y reviendra)
- Leurs salaires ont été élevés
- Leurs cotisations n’ont pas été très élevées car c’est plutôt demain qu’elles vont augmenter
- Le consensus politique est et restera encore longtemps à mon avis au “touche pas à ma retraite”. Notamment parce que cette génération, celles des baby-boomers, a un poids démographique, et donc en démocratie, politique, très important.
En sortir le plus tôt possible
Il y a une autre catégorie de gens qui peuvent encore en bénéficier : à condition de sortir du système dès que possible. C’est mon objectif.
Eh quoi ? Sortir du système de retraite actuel ? Pas possible, les cotisations sont obligatoires !
Oui. Bien sur, elles le sont… à condition d’avoir un salaire et/ou à peu près toutes forme de revenus. Il est bien évident que sur l’ensemble de mes revenus, actuels, passés et futur, je paye au moins une certaine forme de cotisation pour les retraites. Ne serait-ce que la CSG/CRDS. Mais en choisissant d’avoir des revenus bien moindres que ceux auxquels je pourrais prétendre, j’évite de trop cotiser aussi. A noter qu’il existe bien des moyens légaux (et d’aucun en usent et en abusent certainement bien plus que moi) pour payer moins de cotisations, y compris CSG-CRDS.
Le biais sur l’espérance de vie
Par ailleurs, ils existe aussi un second biais, moins connu et plus hypothétique, avec notre système de retraite. Ce second biais, c’est que je suis prêt à parier que ma génération (et pire la suivante) n’aura pas la même espérance de vie que celle de mes parents… Et contrairement à l’idée répandue selon laquelle l’espérance de vie va croitre… Et bien je suis persuadé que pour plein de raisons, elle a toutes les chances au contraire de se réduire…
Enfin, si on cherche à parler de justice, est-ce que ma manière de faire serait plus injuste que le système actuel ?
Les différentes branches de la Sécurité Sociale
Si j’écarte la partie recouvrement (URSSAF), il y a 3 banches à la sécurité sociale :
- Maladie
- Famille
- Retraite
Sur la partie Maladie, je trouve que notre système, même si il est éminemment perfectible à plein d’égard, plutôt très bien. Rien à redire donc. Et j’y contribue, et continuerais d’y contribuer, ne serait-ce par la CSG/CRDS sur mes revenus passifs pendant ma “retraite”. Par ailleurs, retraite ne veut pas dire “absence d’activité rémunérée” mais “indépendance financière”. Donc j’aurais aussi des contributions sur mes éventuels autres revenus. A comparer avec le système américain auquel Mr Money Mustache est confronté, je dirais qu’il n’y a pas photo. Nous avons un système magnifique !
Sur la branche Famille, idem. D’ailleurs, la composition de ma famille fait que je reçois des prestations sans même les demander… (et je n’en ai nullement besoin il faut être honnête – mais je précise aussi que si j’avais moins de revenus, je recevrais encore plus !). Je suis mal placé pour commenter. Mais je peux affirmer que je pourrais m’en passer.
Retraite par répartition ou retraite personnelle, qui est le plus juste ?
Par contre sur la partie Retraite, j’en ai déjà beaucoup dit. Je trouve ma manière nettement plus logique, et au risque de sembler individualiste, nettement plus favorable et juste.
Il est bon de préciser ici que ce que je mets en place pour moi s’apparente à une retraite par capitalisation. Mais n’en est pas exactement une. Je ne confie pas mes cotisations à un organisme tiers dans lequel je placerais ma confiance pour qu’il me serve une rente viagère à échéance d’un certain âge. Ce que ferait un système de retraite par capitalisation. Dans un tel système, l’échéance serait bien plus tard que celle que j’espère d’une part. Comprendre plutôt 65 ans que 40…
D’autre part la rente viagère, pour un montant total de cotisations versées identique serait un peu plus élevée… Mais c’est une rente viagère… L’intérêt que je vais exposer ci-dessous ne s’applique pas. C’était par exemple le cas du PERP en France qui, jusqu’à récemment, ne permettait que la sortie sous forme de rente viagère. Le nouveau système du PER est plus souple (et permet une sortie sous forme de capital mais alors fortement imposée, et toujours à l’échéance “tardive” sauf quelques exceptions).
Alors, juste ou injuste le système de retraite par répartition ?
Imaginons une personne qui décède à 65 ans.
Il a cotisé toute sa vie. Le lendemain de sa retraite (la “vraie” cette fois), il casse sa pipe… Si il n’a pas mis de côté, ses enfants ne toucheront rien. Son conjoint aura éventuellement une maigre pension de réversion (mais je ne connais pas les conditions)… Mais l’essentiel de ses cotisations auront, pour lui et ses proches, été en pure perte.
Et ce que j’ai décidé de faire moi de mon propre chef ?
Voyons ce que vaudrait dans le même cas mon “système de retraite” ?
Imaginons le même type qui met toute sa vie de côté l’équivalent du montant qu’il aurait mis en cotisations retraite obligatoire. A 65 ans, il décide d’arrêter de travailler et de vivre de ses rentes. Il a son capital, décide de retirer chaque année 4% ce capital… Tu me diras, au bout de 25 ans, il est à sec… et bien non ! Car le capital continue de produire des revenus. Et, je fais au plus court, bien investi, ce capital devrait non pas lui durer 25 ans mais une infinité d’années.
Mais si il décède à 65 ans tout juste. Alors ses enfants et son conjoint héritent du capital… C’est toute la différence.
On en revient à la “règle des 4%” !
En fait, à partir du moment où on comprend que si on a 25 à 30 fois ses dépenses annuelles dans un patrimoine “bien investi” (ie qui rapporte en moyenne 4% par an), alors on peut, sans risque de finir à sec quelle que soit l’échéance, retirer chaque année le montant de ses dépenses annuelles… C’est ce que je fais, et je m’efforce de t’expliquer comment.