Des investissements écolo-compatibles… le grand dilemme
Au-delà du choix de sa banque, dès lors qu’on commence à avoir un peu d’épargne, se pose la question de quoi en faire. Je suis un grand fan de Jean-Marc Jancovici depuis de nombreuses années et pour moi se pose la question éthique d’avoir un impact environnemental le plus faible possible pour mon épargne. En effet, ça servirait à quoi de chercher à un impact environnemental faible dans sa vie quotidienne si derrière, mes investissements n’étaient pas maîtrisés de ce point de vue là ?
J’avais posé la question à Jean-Marc Jancovici directement lors d’une soirée avec les internautes et il avait eu la gentillesse de choisir ma question et d’y répondre : son avis n’était pas « brulez votre argent » mais il parlait de mémoire d’acheter par exemple des forêts il me semble mais je n’avais pas eu malheureusement de réponse très concrète (manque de temps certainement).
C’est aujourd’hui une vraie problématique. Qui rencontre un intérêt croissant auprès d’un nombre de plus en plus important d’investisseurs, qu’ils soient professionnels ou particuliers.
Ma priorité : limiter le changement climatique
Derrière la notion d’investissement écolo-compatible, il peut y avoir une multitude de définition. Le monde de la finance dispose d’une dénomination pour ça : l’ESG, pour les critères “Environnementaux, Sociaux et de Gouvernance”. Il exite un label: le label “ISR” pour “Investissement Socialement Responsable”. On voit déjà dans la dénomination que c’est très large et par forcément écolo…
Certaines application sont donc naturellement plus écolo que d’autres. D’autres plus axées “aide au développement” des pays émergents. Certaines clairement axées “social” et parfois sans le moindre intérêt environnemental.
Pour ma part, ma priorité est de limiter le changement climatique. C’est ce que j’applique à ma vie quotidienne (limiter mes émissions de gaz à effet de serre). Il est donc naturel pour moi de chercher à l’appliquer à mes investissements.
Le reste ne vient pas “après”. Pour moi, il vient naturellement par ricochet. Mais c’est bien par l’axe “climatique” que j’aborde la question.
Comment j’investis “Ecolo-compatible”
Je vais te donner mon avis personnel.
{Disclaimer: Je ne souhaite dans cet article faire la promotion d’aucun instrument financier. Je ne te recommande pas quoi que ce soit. Tes investissements doivent être en regard de ta situation financière personnelle et tu dois toujours avoir conscience que tu peux à tout moment perdre tout ou partie de ton capital initial, ou ne pas pouvoir récupérer ton argent au moment où tu en as besoin}
Le locatif ancien à rénover
Investir dans du locatif ancien à rénover en ville, plutôt dans les quartiers « populaires » mais que tu rénoves (ou fait rénover) parfaitement (avec l’art et la manière qui va bien quand on a les convictions qui sont les nôtres: du durable au sens « longue durée de vie »), et loué en dessous du prix du marché (aspect social. Il existe différents modèles pour faire ça bien tout en étant raisonnablement rentable comme on le verra prochainement). Maître mot : ne jamais acheter dans le neuf pour de la défiscalisation… Et ça prend du temps… (si tu délègues tout, tu ne maîtrises pas la manière dont c’est fait, et ça sera pas fait d’une façon écolo-compatible et encore moins socialement compatible). Je compte une journée par mois par logement loué (hors période de travaux).
Pourquoi est-ce un investissement écolo-compatible ?
Quels sont les intérêts environnementaux ?
Tu investis en ville. Dans la plupart des cas, mes locataires cherchent à se rapprocher de leur travail, des commerces, des transports en commun. Certains voient même dans leur nouveau logement la possibilité d’abandonner leur voiture, d’aller faire leurs déplacement à vélo ! Ils économisent donc financièrement sur les transports et par ricochet, cela limite leur empreinte carbone. Cela réduit ainsi celle de ton investissement.
De même, tu rénoves. Tu participes donc à la réhabilitation de l’habitat ancien. Cela contribue à remettre en service des logements qui sinon auraient du être reconstruits ailleurs et souvent plus loin. La construction de logements neufs est autrement plus conséquente en terme d’émissions de gaz à effet de serre. Et si c’est “plus loin”, ça veut dire “plus de déplacements”.
Enfin, tu isoles. Dans la rénovation, tu incluras, si ce n’est pas déjà fait, une isolation et des fenêtres performantes. Cela participe aussi à l’intérêt environnemental de ton investissement. La rénovation de l’habitat ancien étant un des axes majeurs de la transition écologique, tu y participeras alors activement.
L’investissement participatif
Investir sur des plateformes de financement participatif où tu choisis individuellement les projets que tu souhaites soutenir (avec tes critères d’investisseur écolo-compatible évidemment…). Il en existe plusieurs, certaines plus orientées que d’autres dans divers domaines (ENR pour ceux que ça bote, PME, agriculture bio et locale, ou agroalimentaire, immobilier…) ou au contraire généralistes… Il y a évidemment le risque que la boite que tu as financé fasse faillite et ne te rembourse pas ce qu’elle t’a emprunté. D’où la nécessité de diluer le risque en investissant sur plein de projets (voire plein de projets sur plein de plateformes). Chaque fois une petite somme, plutôt qu’une grosse sur un petit nombre de projet. A noter que ça aussi ça prend du temps… (pour être à l’affut des prêts « intéressants », au moment où ils arrivent, et pour suivre et réinvestir les remboursements).
Pourquoi est-ce un investissement écolo-compatible ?
Parmi les investissements “écolo-compatibles”, il y a bien plus que juste financer les énergies renouvelables. C’est peut-être bien. Mais éminemment pas suffisant. Un grand nombres d’autres projets peuvent être sélectionnés. Tu peux penser aux investissements visant à réduire les consommations d’énergie. Il y a des projet axés sur la rénovation de l’habitat. Tu peux sélectionner parmi les entreprises que tu finances d’exclure certains domaines où en favoriser d’autres. Par exemple, pour ma part, j’exclus les transports routiers, les concessionnaires automobiles (nombreux à solliciter des financements sur ce type de plateforme), les industries liées aux plastiques jetables, etc.
Les investissements en actions écolo-compatibles
Plus orienté « action », il y a aujourd’hui à ma connaissance, 2 ETF (Exchange Traded Fund) basés sur des indices à vocation « bas-carbone ». Je reviendrais dans un autre article sur les intérêts des ETF qui sont des fonds passifs (qui se contentent de recopier passivement un indice sans chercher à “boursicoter”) par opposition aux fonds actifs (qui achètent ou vendent des actifs en fonction de critères et de décisions humaines). Mais contentons nous pour l’instant de voir en quoi ces 2 ETF sont intéressants dans une optique d’investissements écolo-compatibles.
L’indice “Low Carbon 100”
Le premier est basé sur une étude de Carbone 4. Il investit sur les 100 entreprises européennes (parmi l’EURO Stoxx 600) qui sont les moins carbonées de leur domaine (donc il y a de tous les domaines, y compris pétrole notamment) mais on prend les meilleurs (Stratégie dite « Best-In-Class »). Voici un article récent sur cet indice sur le site de Carbone 4.
L’ETF est tenu par une filiale de la BNP: BNPP EASY LOWCARB (LU1377382368).
L’indice “Eurozone Paris-Aligned Climate”
Le second est basé sur une approche différente. Il sélectionne les entreprises européenne en fonction de leurs objectifs et engagements de réduction de leurs émissions de carbone au regard des accords de Paris. Il est nettement plus récent et si je devais résumer, là où le 1er évalue en fonction des performances actuelles de chacun (avec réévaluation annuelle) en excluant personne, le 2nd commence par exclure un certain nombre de secteurs, puis évalue les performances et les engagements de chacun pour établir son classement. A tel point que sur les 25 premières lignes de chacun des 2, il n’y a que 11 entreprises en commun…
Ce second ETF est tenu par une filiale de la Société Générale (Lyxor): Lyxor S&P Eurozone Paris-Aligned Climate (LU2195226068)
A ma connaissance, ce sont les deux seuls fonds passifs qui ont pour ambition première de favoriser les entreprises avec une stratégie « bas carbone ».
Il existe de nombreux fonds actifs qui prétendent plus ou moins avoir cette ambition. Parfois parmi d’autres… Mais comme avec tout fond actif, là, tu remets les clés du camion à une équipe d’analystes financiers. Et ceux-ci font leurs choix avec leurs critères propres. Les résultats sont alors très dépendants de la pertinence de ces décisions. Par opposition à un indice qui est fixé par un algorithme déterministe et connu à l’avance. Et accessoirement, ça te coûte de l’argent chaque année…
Une stratégie rentable qui demande peu de temps et peu de connaissances
Gros avantages de cette solution: une fois que tu as choisi ta stratégie, ça ne prend que très peu de temps. Chaque mois tu mets sur ton PEA ou CTO ton épargne du mois, soit 5 min pour faire ton virement. Puis tu passes ton ordre d’achat. 1 seul – selon la stratégie que tu as choisie, soit à nouveau 5 min.
Et tu bénéficies d’un rendement qui est approximativement celui de la bourse. Avec un petit bonus car, comme démontré par Carbone 4, ce type de stratégie a un petit avantage concurrentiel par rapport à la moyenne « a priori » sur le long terme. Et sur le long terme (>8ans), c’est ce type d’investissement – les actions – qui a le meilleur rendement.
Tu me diras « ce sont les tendances historiques mais à l’avenir, on en sait rien ! ». C’est exact… Il est tout à fait possible que la bourse effondre sans remonter derrière. Dans le monde qui vient c’est un risque non négligeable. Mais dans ce cas, alors les autres classes d’actifs (obligations, matières premières, métaux précieux, immobiliers, etc) risquent fort de s’effondrer aussi…
In fine, si tu as le temps (et l’envie !), une combinaison des 3 est à privilégier. Avec l’avantage de diluer le risque. Si tu n’as pas le temps (ou pas l’envie, ou pas les compétences), la 3ème seule est à envisager.